Aides aux entreprises : le rapport qui pointe un gisement d’économies entre 3 et 10 milliards d’euros
Sources : lesechos.fr par Sébastien Dumoulin – 03/09/2024
L’Inspection générale des finances s’est penchée sur le maquis des aides publiques aux entreprises. Après en avoir analysé un petit quart, elle estime possible de récupérer 3 milliards d’euros en coupant dans ces subventions et aides fiscales, et 7 milliards supplémentaires en touchant aux taux réduits de TVA dont profitent certains secteurs.
La note est succincte, mais explosive. Dans une « revue de dépenses » sur les aides aux entreprises, réalisée à la demande de Matignon, l’Inspection générale des finances (IGF) propose de sabrer ces multiples dispositifs de soutien – budgétaires et fiscaux pour diminuer les dépenses de l’Etat de trois à dix milliards d’euros.
Le levier d’économies le plus simple et le plus rentable identifié par l’IGF est celui de la TVA. La proposition tient d’ailleurs en quatre lignes dans son rapport. L’Etat pourrait récupérer 4 milliards d’euros de taxes en supprimant certains taux réduits de TVA dans la restauration, l’hôtellerie, l’accès aux stades, l’eau en bouteille, etc. Et trois milliards d’euros supplémentaires en relevant le taux intermédiaire (qui concerne notamment les produits alimentaires, les nuitées d’hôtel, les spectacles, certains travaux immobiliers…) de 10 % à 12,5 %.
Hausse des taxes sur les carburants
En plongeant dans le maquis des aides aux entreprises, l’IGF a également identifié plusieurs pistes d’économies moins génériques – pour un total de trois milliards d’euros. De multiples dispositifs sont jugés inutiles ou trop généreux. En tête de liste arrivent les coups de pouce énergétiques. En supprimant certains tarifs préférentiels sur le gazole (pour le transport routier et les taxis) ou les biocarburants, le rapport estime que l’Etat pourrait récupérer plus de 900 millions d’euros. Et même un milliard en réservant également les tarifs électriques préférentiels aux seules installations industrielles électro-intensives.
D’autres propositions peuvent rapporter gros. Arrêter de financer les missions d’accompagnement des entreprises par les chambres de commerce (CCI), les chambres de métiers (CMA) et la BPI ferait par exemple économiser 800 millions d’euros. L’IGF propose également un resserrement du crédit impôt recherche (CIR) – dont le coût d’environ 6 milliards d’euros par an en fait la première des niches fiscales et l’objet de critiques récurrentes. Le rapport estime qu’en « supprimant le dispositif des jeunes docteurs, en resserrant la liste des activités éligibles […] et en réduisant le taux forfaitaire des frais de fonctionnement de 43 % à 40 % », il serait possible de diminuer la facture du CIR de 450 millions d’euros.
Rogner le « pacte Dutreil »
Parmi les autres pistes, on peut citer la restriction de l’avantage fiscal du pacte Dutreil pour la transmission d’entreprises (100 millions d’économies) ou encore le relèvement de 10 à 15 % de la « patent box », c’est-à-dire le taux préférentiel d’impôt sur les sociétés réservé aux actifs issus de la propriété intellectuelle (200 millions). De nombreuses mesures moins lucratives viennent compléter le tableau : rogner les aides fiscales aux buralistes (50 millions), aux créateurs de jeux vidéo (40 millions)…
Toucher à ces dispositifs serait cependant politiquement délicat : les taxis, comme les buralistes ou les autres entreprises visées ne se laisseront pas taxer davantage sans rien dire. Il y a toutefois un élément rassurant pour tout futur gouvernement à la recherche d’économies : l’IGF a identifié 3 milliards d’euros d’aides aux entreprises « dispensables » en ne se penchant que sur un petit sous-ensemble d’environ 23 milliards (soit tout de même 13 % de dépenses superflues). Les aides aux entreprises de l’ensemble des ministères, mais aussi des collectivités locales, de la Sécurité sociale ou de l’Union européenne se montent, en cumul, à plus de 100 milliards d’euros – sans même compter les mesures de soutien générales comme les allègements de cotisations sociales ou encore la commande publique. Un gisement d’économies potentielles plus vaste que celui décrit par l’IGF.